COMPLOT DE 1959-1960 CONTRE IBRAHIM DIALLO

Nombre total de détenus officiels au camp Camayenne – futur camp Boiro: quarante-quatre (44)Motif : Rédaction d'un manifeste pour la création d'un parti politique dénommé Parti Progressiste de Guinée (PPG).Lieux de détention : Conakry, Koundara, Mali, Dabola, Guéckédou, Nzérékoré et Dalaba. En effet, après quelques mois passés à Conakry, les détenus furent transférés dans des prisons de l'intérieur du pays afin de libérer des places à Conakry. .

  1. Diallo Ibrahima, magistrat, ancien étudiant en Guinée en 1959
  2. Elhadj Kaba Lamine, imam de la mosquée de Coronthie à Conakry
  3. Diallo Yaya, ingénieur, ancien étudiant en France rentré en Guinée en 1959
  4. Touré Fodé dit le Gros, ancien étudiant en France rentré en Guinée en 1959
  5. Docteur Rossignol, pharmacien
  6. Bachelard Pierre, pilote d'aéronef

Nombre total de détenus au Camp Camayenne : quarante-quatre (44)

Furent exécutés le 17 mai 1960 au Mont Kakoulima

  1. ALTARY Adolphe, exécuté le 17/05/1960
  2. BAKALE Sankhon, exécuté le 17/05/1960
  3. BAKELE Ousmane, commerçant, mort
  4. BANGOURA Ibrahima, de Coyah, exécuté le 17/05/1960
  5. BARRY Amadou, dit Téla, exécuté le 17/05/1960 au Mont Kakoulima
  6. BROUKAYA Bernard, sergent-chef, mort
  7. CAMARA Abou, dit Kipé, commis, exécuté le 17/05/1960 au Mont Kakoulima
  8. CAMARA Fodé, dit Le Gros, décédé le jour de sa libération en 1961
  9. CHAOUL Najib, pendu au Mont Kakoulima le 17/05/1960
  10. CHAOUL Saïdou, commerçant libanais, mort
  11. DIALLO Ibrahima, magistrat, exécuté au Mont Kakoulima
  12. DIALLO Mamadou Dian, comptable CFFD, mort à Boiro
  13. DIALLO Yaya Bowé, ingénieur PTT, décédé après libération en 1961
  14. DRAME Tibou, dit Balance, arrêté en 1961
  15. FOFANA Sékou, agent des douanes, arrêté et mort en 1960
  16. GABRIEL Antoine, instituteur, arrêté et mort en 1960
  17. GAHETAN Adolphe Fodé, exécuté en 1960
  18. KABA El Hadj Mohamed Lamine, imam de Coronthie, arrêté en 1959, exécuté en 1960
  19. KOMBO Facinet, exécuté le 17/05/1960
  20. Mamadou Dian, dit Brosse, exécuté le 17/05/1960
  21. M’PADIGUI Bernard, exécuté le 17/05/1960

« SÉKOU TOURÉ Un totalitarisme africain »

De Maurice Jean Jean

Chapitre VII

Le complot permanent

« L’arme que Sékou Touré a maniée avec le plus d’efficacité aura été le complot. Tous ceux qui avaient le savoir, la fortune, la naissance, n’étaient que des condamnés en sursis. Tous étaient fichés et « programmés » pour un « complot » à venir qui tombait chaque fois à point nommé pour distraire le peuple de sa misère et de ses souffrances ».

Alpha-Abdoulaye Diallo (page 129)

Dans un discours prononcé devant la 3ème Conférence de l’OUA tenue à Accra du 21 au 25 octobre 1965, Sékou Touré déclare : « Il n’y a pas eu ni un, ni deux, ni trois complots en Guinée. Avant et après le 28 septembre 1958, la Guinée fait face à un complot permanent qui durera autant que la volonté de progrès, de démocratie, de liberté et d’indépendance de notre peuple. » La dénonciation de complots réels mais le plus souvent inventés va permettre à Sékou Touré de maintenir le peuple de Guinée dans une situation d’insécurité, de peur, de dénonciation, créant entre les citoyens un état permanent de méfiance qui lui permettra de se maintenir au pouvoir en dépit de tous les échecs pendant 27 ans. Mais même si certains complots ont connu des débuts de réalisations comme le premier complot d’avril 1960, ou se sont matérialisés comme le débarquement des portugais et des exilés guinéens le 22 novembre 1970, Sékou Touré a dans tous les cas procédé à l’amalgame, profitant de ces situations troubles pour éliminer ses opposants puis ses partisans perçus comme concurrents potentiels

1-(Page 130) Le premier complot dit « des agents du colonialisme français et des intellectuels tarés »

est dénoncé le 20 avril 1960 par Sékou Touré. Il aurait été préparé en Conseil des ministres français et devait avoir le Sénégal comme tête de pont. Selon les dires de Georges Chaffard, confirmés par Mamadou Dia alors premier ministre du Sénégal, la SDECE aurait préparé une opération destinée à déclencher un soulèvement dans le Fouta-Djalon où vivaient de nombreux ex-militaires de l’Armée française opposés à Sékou Touré. Il était prévu des incursions périphériques aux frontières du Sénégal et de la Côte d’Ivoire pour appuyer cette action. Ce soulèvement tourna court. Or dans le même temps, et sans qu’il y ait eu un quelconque lien entre les deux actions, des opposants guinéens à Sékou Touré projetaient de lancer un parti d’opposition, le Parti Progressiste Guinéen (PPG). Le maître d’œuvre en était Ibrahima Diallo, brillant juriste, inspecteur général du Travail, qui était entré en rivalité avec Sékou Touré dans les années 1956-1957 alors qu’il demandait en tant que Président des Etudiants Guinéens en France à Sékou Touré alors député au Parlement Français de justifier ses actions. Il avait eu l’audace de s’écrier à la tribune officielle lors de la célébration du 1er anniversaire de l’Indépendance le 1er octobre 1959 : « Vive la République de Guinée avec, à sa tête, des hommes compétents et intègres. »
Est également impliqué El Hadj Fodé Lamine Kaba, iman de la mosquée de Coronthie, qui s’opposait à la politique oppressive de Sékou Touré notamment dans le domaine religieux. Ce n’est que plus tard, dans les années 1970, que Sékou Touré devint un fervent de l’Islam. Mais il fallait trouver une preuve de la participation française à ce complot. Un citoyen français, M. Rossignol, qui gérait avec son épouse une pharmacie à Conakry, servit d’alibi. Il avait le grand tort de posséder un petit bateau de plaisance et un poste émetteur-récepteur. Il fut arrêté, emprisonné et libéré le 2 avril 1962 sans avoir été jugé. Chez les comploteurs guinéens il y eut sept condamnés à mort dont certains périrent sous la torture
Selon Sékou Touré, ses adversaires intérieurs et extérieurs étaient en permanence sur la brèche pour l’éliminer. Il dénonce dans ses œuvres complètes, entre les complots majeurs, différentes opérations attentant à sa personne. Ainsi en décembre 1960 son hélicoptère aurait été saboté lors d’une visite en Sierra Leone. En septembre 1961 il a été informé d’un projet d’assassinat qui devait être exécuté à l’occasion de la Conférence des pays non alignés qui se tenant à Belgrade. Il a finalement renoncé à y assister.


1 Camp Boiro – Parler ou périr – R.A. Gomez – 2007 – Ed. L’Harmattan – pp. 195-196.2 Extrait du livre de Alsény René GOMEZ, ancien ministre de l’Intérieur et de la Sécurité : Camp BOIRO – Parler ou Périr –Ed. L’Harmattan, 2007